Notes de lecture : Fode Kaba II, des Diambars dans le vent

Le livre du Colonel Mbaye Cisse est le récit de l’intervention militaire sénégalaise en Gambie mais c’est aussi une histoire de notre jeune armée et des chefs militaires dont le courage et le sens du devoir ont toujours pallié le manque de moyens et parfois même de logistique. Dans la préface du livre, le Général Abdoulaye Fall ancien chef d’Etat Major écrit « le choix d’une manœuvre interarmées (aviation, marine et forces terrestres) a mis en relief la bonne maitrise de l’art opérationnel … parce que la combinaison des trois armées confère à l’action militaire plus de souplesse, une surprise tactique facilitée par la vitesse en partant toute son efficacité ». C’est un excellent résumé du livre. Le livre est fort intéressant parce qu’il permet de comprendre comment une jeune armée d’un pays indépendant depuis seulement 20 ans a pu monter sans couac majeur une opération interarmée une des manœuvres les plus compliquées sur le plan militaire. La jeune armée a pu monter une opération aussi compliquée parce que en plus du courage et de l’esprit de sacrifice, elle était commandée par des hommes qui ont acquis une grande expérience militaire lors des guerres d’Algérie et d’Indochine comme les colonels Abel Ngom ( Chef de l’opération) et Amadou Abdoulaye Dieng sans oublier le Chef d’Etat Major Idrissa Fall qui était déjà Lieutenant lors de la guerre d’Algérie. Le livre est aussi une histoire de nos grands chefs militaires et leur professionnalisme comme le Commandant Bampassy du Groupement des commandos qui profite de l’opération Fode Kaba 1 ( un an avant Fode Kaba 2) pour « faire une reconnaissance de toutes les zones de saut pour les paras et préparer le terrain pour Fodé Kaba 2 » et de conclure dans son rapport « qu’il y a une absence de renseignement sur la situation et un déficit de cartes. Faute de ces renseignements Fode Kaba 2 risque d’être une catastrophe ». Les leçons de Fode Kaba 1 seront tirées et garantiront le succès de Fode Kaba 2 qui sera « une opération aéroportée combinée avec des forces terrestres partis de Ziguinchor, Kaolack et Tamba plus une opération navale ponctuée par un débarquement sur les côtes gambiennes ». Ce livre est aussi un traité d’histoire de notre armée. On y a apprend que c’est au colonel Abel Ngom que l’on doit la devise des commandos le fameux « Goor Fit ». Le « Goor Fit » vécu jusqu’au bout par le commandant Bathily qui étant absent lors de l’alerte et du départ de Tamba se lancera dans une folle chevauchée solitaire pour rallier la Gambie et faire son devoir avant d’être capturé par les rebelles. C’est ce courage et cette témérité qui font la grandeur de nos chefs militaires et qui ont permis le succès des Fode Faba 1, Fode Kaba 2 et Gabou. Les leçons tirées de Fode Kaba 1 ont permis la réussite de Fode Kaba 2. Il faut donc tirer les leçons de Fode Kaba 2 pour réussir Fode Kaba 3 qui est inévitable. Le livre du colonel Cisse nous rappelle que la Gambie de Diawara était une démocratie, une des rares démocraties du continent. Fode Kaba 3 consistera à restaurer la démocratie en Gambie. La paix en Casamance ne sera définitive qu’avec une Gambie démocratique sans Jammeh car les démocraties ne se font pas la guerre et le meilleur exemple est la Guinée Bissau qui a chassé le MFDC avec le retour de la démocratie. Cette démocratie que Koukoy voulait balayer et qui va lui assurer une dernière demeure. Koukoy Samba Sagna ( l’auteur du coup d’Etat en Gambie) est mort et le Sénégal qui a perdu 33 soldats lors de son coup d’Etat lui a offert une tombe, ce que son pays, une féroce dictature lui a refusée. Une tombe dans un pays démocratique c’est tout ce que le Sénégal pouvait faire pour Koukoy qui a passé toute sa vie à comploter contre la Démocratie dont les principes ont été un rempart entre lui le Dictateur de Kanilai grâce au Sénégal. Koukoy enterré au Sénégal est le meilleur hommage du vice à la vertu. En conclusion le livre du Colonel Cisse « prouve que nos officiers sont aussi capables de rédiger que de faire la guerre » à l’image des grands militaires comme Alexandre( initié aux grands textes par Aristote), César ( la guerre des Gaulles) ou De Gaulle ( le fil de l’Epée) qui ont été de grands militaires mais aussi de grands écrivains.